Le désir de lire ce roman conseillé par Pretty Rosemary m’immergea dans une grande expectative ; ce roman des romans, faisant l’éloge de la fantasy et de la science-fiction par une adolescente chétive me donnait souhait de m’immerger délicieusement entre les pages que j’imaginais empruntes d’un amour intense pour ces objets que je caresse chaque jour. Malheureusement, l’imaginaire ne s’est pas confronté au réel qu’il offrait, de premières pages prometteuses je suis tombée dans le précipice ravageur de la lassitude, du désappointement, pas même d’un brin de colère là normalement pour m’envahir de ma hargne. Ici, je n’ai rien ressenti, quelques morceaux tout au plus, de sursaut d’intérêt pâle, fantomatiques, dilués dans les remarques de cette gosse au caractère page blanche, impersonnel. Morwenna ne porte que son prénom d’une beauté immatérielle, mais le récit porte la monotonie d’un soir d’hiver où la cheminée ne flamberait qu’un microcosme de passion mouillé, gâché.

Je ne sais pourquoi je l’ai lu jusqu’au bout, sûrement car l’espoir brillait d’une fin à la hauteur de ces passages forcés, de cette artificialité à chaque phrase du carnet. L’enfant raconte ses peines… elle raconte plutôt ses critiques vis-à-vis de ce monde, de son internat qui, sourire à mes lippes, me rappelait vaguement ce pensionnat dans La petite princesse. Peut-être alors que les influences, les références, naturellement se distillent au sein de l’univers de Joe Walton qui chatoient après la couverture refermée. C’est l’un des rares points positifs car des manquements, des fragments pullulent. Le livre est, par ailleurs, vendu dans la section fantastique, car, après les livres viennent les fées, qui elles aussi, ne sont pas du tout exploitées, tout juste si elles ont le temps d’être expliquées. Elles sont là, choses hideuses ou esthétiques, petites créatures adorables, mystérieuses juchées au bord des branches, sauvages, invisibles à ceux qui ne croient pas, l’allusion à Peter Pan est féroce sur ce point-là. La magie ensuite se faufile doucement entre les lignes, Morwenna l’utilise pour ses besoins personnels, pour sa protection contre cette mère vengeresse, reine noire clichée suprême. Mais le flou subsiste, le vécu ombrageux de la gosse persiste, l’écrivaine ne nous narre rien qu’une vie quotidienne jonchée de romans SF et de fantasy, de cours et d’examens, quelques fois des départs en vacances. Les thèmes abordés sont expédiés bon gré mal gré d’un coup de pied. Alors que ce roman pourrait être passionnant, les liens entre la mère que l’on ne voit jamais et sa fille, les liens père fille, le lynchage à l’école, la passion des livres qui ouvre la voie à une possibilité extrême se soufflent dans un mouchoir. Bâclé voilà le mot que je cherchais.
Morwenna est une histoire morne qui ne m’a pas accaparée, j’en laisse tout de même une trace avec cette chronique, et, bien qu’il soit fade, dénué de passion (quand on parle de livres on se doit de transmettre le maximum possible) j’aurai voulu l’aimer comme d’autre l’ont aimé. Toutefois cette désagréable impression, ténue, vicieuse, serpent aux fourrés de ma colère, me fait avouer, à demi coupable, que l’auteur aurait pu faire mieux, beaucoup mieux, elle tenait les idées riches en sens, ces idées émotions précieuses à la préservation d’un roman, les livres, la magie, les fées, cette jeune fille perdue, désabusée, méfiante envers cet environnement nouveau dont elle n’arrive pas à s’adapter promettait quelques tensions, quelques larmes, quelques rires jetés à la trappe par le désir de l’artiste.
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